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Un groupe de chercheurs a déclenché une avalanche géante dans une vallée isolée du Valais. Leur objectif: mieux comprendre comment les avalanches dévalent les pentes pour protéger villages et voies de communication.
Le jour n’est pas encore levé sur Anzère. Une douzaine de femmes et d’hommes lourdement chargés avancent en ski de randonnée ou en raquettes dans l’air glacé du petit matin. Il s’agit de chercheurs en route pour le déclenchement d’une énorme avalanche. Ils sont suivis par un groupe de journalistes qui désirent rapporter exactement ce qui se passe aux téléspectateurs et aux lecteurs de leurs journaux.
Une demi-heure plus tard, les voici tous arrivés sur le promontoire rocheux où ils pourront installer leurs instruments et caméras afin d’observer le raide versant opposé. Un hélicoptère survole la vallée. L’homme posté près de la trappe de chargement ouverte tient un appareil de balayage laser. Il peut ainsi mesurer les quantités de neige présentes sur le versant avalancheux. En aval, des postes de surveillance garantissent que personne ne pénètre dans la zone. D’autres chercheurs sont installés dans un bunker sur le versant opposé et effectuent les derniers préparatifs pour les mesures.
Au cours de la semaine écoulée, il est tombé pratiquement un mètre de neige fraîche. L'Institut WSL pour l’étude de la neige et des avalanches SLF a émis un avis de danger un degré sous le maximum possible, et le bulletin météorologique promet une matinée ensoleillée. Les conditions idéales sont donc réunies pour une grande expérimentation d’avalanche.
L’hélicoptère s’envole à nouveau vers les crêtes. Cette fois-ci il a embarqué des explosifs qu’il va placer tout en haut d’un versant raide. L’explosion doit mettre l’avalanche en mouvement. Les regards des chercheurs sont anxieusement dirigés vers l’amont : est-ce que ça va marcher ? Une déflagration, puis un nuage de fumée. Pendant un moment, aucun mouvement... l’avalanche va-t-elle se déclencher ? Soudain, le manteau neigeux commence à glisser, on distingue une ligne de rupture. Et c’est parti ! L’avalanche se déploie et grossit comme une pelote de laine. Elle est de plus en plus large et rapide, fait virevolter la poudreuse, atteint les premiers arbres. Un spectacle fascinant: le phénomène est large d’environ 200 m, parcourt 2,5 km et atteint une vitesse de 200 km/h.
Après le départ de l’avalanche, l’hélicoptère mesure à nouveau la hauteur de neige en vallée. Cela permet d’évaluer la neige que l’avalanche a emportée, et quelles quantités ont été déposées. Dans le bunker, les chercheurs contrôlent que toutes les mesures ont bien été effectuées. Cette fois-ci encore, ils ont collecté des données précieuses sur les pressions exercées, la vitesse, les températures et l’épaisseur des masses de neige en mouvement.
Pourquoi de tels déclenchements expérimentaux?
Lorsque les caractéristiques de la neige et les conditions météorologiques le permettent, le SLF effectue de telles expériences chaque hiver, depuis pratiquement 20 ans. Les chercheurs peuvent ainsi comprendre de mieux en mieux le comportement des avalanches et les forces qu’elles exercent sur leur passage. Ces informations aident les autorités communales à faire progresser la protection contre les avalanches: où peut-on construire, où vaut-il mieux éviter toute habitation ? Où est-il nécessaire de placer des ouvrages de protection, notamment digues, filets, murs, et quelle doit être leur résistance ?